Face à une culture de la consommation, de la standardisation et de l’appauvrissement de la qualité des produits, ma pratique artistique cherche à revaloriser le savoir-faire artisanal. Cela est véhiculé par le choix des matériaux, leurs origines (recyclage) et les processus de fabrication. Mais la meilleure manière d’apprécier la valeur d’un produit reste de le fabriquer soi-même. Ainsi mes projets se tournent si possible vers la co-conception et la co-fabrication avec le futur usager. Cette idéologie fut expérimentée avec le projet Double peau dont la moitié des étapes de fabrication fut réalisée par la cliente.

On n’apprend pas à devenir menuisier, ébéniste ou peintre en un jour. En revanche comme dans tous métiers, il y a certaines missions qui sont plus facilement accessibles. Ainsi dans un projet en co-fabrication, le rôle du designer est d’attribuer les différentes missions selon le niveau de compétence ou le taux de réceptivité de chacun.

Co-fabrication

Dans le cadre du projet Double Peau, seules les phases de délignage (découpe qui a pour objective d’avoir des planches de la même largeur), de rabotage et de création du cadre nécessitent des compétences particulières. A contrario l’étape suivante peut être réalisée par toutes personnes adultes ayant un peu de volonté. Celle-ci consiste à découper 500 trapèzes de la même taille à l’aide d’une scie à onglet. Au premier démarrage le « client-apprenti » peut être surpris par le bruit occasionné et par la puissance de la machine mais après avoir fait un tour général de son fonctionnement et après avoir fait quelques essais sur des chutes assez fines, le nouvel utilisateur ne se laissera plus impressionner. Il sera alors temps de lui préparer un gabarit et de lui montrer comment découper précisément la pièce en question. Selon les personnes, les 5 ou 10 premiers trapèzes en bois ne seront pas forcément égaux. Mais après une bonne trentaine, le client aura trouvé le rythme et vous suppliera avec le sourire de lui passer plus de planches pour qu’il puisse découper davantage. Car l’acte de créer est tout simplement plaisant.